Dol et Franchise: jusqu’à quand peut-on agir ?
Jusqu’à quand une action sur le fondement du dol est-elle recevable ? L’épineuse question du délai de prescription en cas de dol a fait couler beaucoup d’encre. Une règle essentielle est énoncée à l’article 2224 du Code civil en ces termes :
« les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »
En présence d’un dol, la question consiste à déterminer si le délai de cinq ans peut commencer à courir dès la conclusion du contrat. Ou s’il faut au contraire reculer le point de départ du délai de prescription… et jusqu’à quand ?
Cette question se pose dans de nombreux domaines, par exemple s’agissant de l’obligation de mise en garde du banquier. La Cour de cassation a statué en ces termes dans un arrêt du 5 janvier 2022 « Il résulte de ce texte que l’action en responsabilité de l’emprunteur non averti à l’encontre du prêteur au titre d’un manquement à son devoir de mise en garde se prescrit
par cinq ans à compter du jour du premier incident de paiement, permettant à l’emprunteur
d’appréhender l’existence et les conséquences éventuelles d’un tel manquement. »
Le même raisonnement trouve s’appliquer s’agissant de la responsabilité du franchiseur qui aurait manqué à son obligation d’information précontractuelle. Le délai de prescription ne peut alors pas commencer à courir dès la signature du contrat de franchise, car il faut un certain temps pour que le franchisé prenne la mesure de l’écart entre les prévisionnels et les chiffres effectivement réalisés. Cette règle a été rappelée dans un arrêt rendu le 1er décembre 2021 par la Cour de cassation. Toute la question consiste alors à déterminer quel est un délai raisonnable. La jurisprudence est très casuistique. Dans un arrêt rendu le 16 novembre 2022 par la Cour de cassation (Cass. Com. 16 novembre 2022, n°21-22.845), les juges ont décalé de quatre années le point de départ du délai de prescription afin de garantir au franchisé au moins un exercice complet pour évaluer la rentabilité de son exploitation.
Cette jurisprudence est parfaitement censée : la réponse générale apportée par les tribunaux est que le délai ne peut commencer à courir avant que le franchisé ait eu connaissance des conséquences du défaut d’information, c’est-à-dire au moins après l’élaboration du premier bilan, et en général plutôt après deux (voire 4 !) années d’exercice.